le Pirate Forum
    L'administration

  
Je croyais que la France détenait le record de la complexité en terme d’administration. Et bien, ici, en Allemagne, je m’aperçois que c’est également complexe et parfois un peu ubuesque.
Comme vous le savez peut-être, je vais aller travailler comme « médecin invité » (Gastärztin ) à Berlin, qui, normalement, est au sein de l’Union Européenne. Il y a normalement équivalence de diplômes. Je suis par ailleurs médecin des Hôpitaux Publics français, recrutée sur concours national. Tout le monde s’accorde ici à dire que je parle bien allemand.
Mais bon… rien n'est simple...

Pour venir ici, librement, de mon plein gré, pour travailler (non payée en Allemagne mais par mon hôpital français d'origine), j’ai besoin :

- de m’inscrire auprès de la mairie du lieu où je vais habiter – mais dans les 15 jours maximum avant mon déménagement, pas avant…
- d’avoir un examen de santé fait par un médecin allemand (français, ça ne leur convient pas) attestant que je suis psychologiquement et physiquement apte (ils ne font donc pas confiance dans leurs homologues français qui m’emploient depuis plus de 15 ans). Mes attestations de l’Ordre National des Médecins ne leur suffisent pas (à quoi ça sert, alors, que je paie tant ce fichu Ordre des Médecins ???)
- ensuite, faire la demande de casier judiciaire en Allemagne : il faut 4 semaines pour instruire mon dossier (sachant que je leur ai donné mon casier judiciaire – vierge ! – français), après être certain que je suis bien enregistrée à une adresse en Allemagne
- je dois obtenir un permis de travail (délai d’obtention : environ 4 semaines également), avec l’attestation que je suis bien inscrite à la mairie et l’attestation du casier judiciaire vierge et le certificat de bonne santé
- tous mes papiers doivent être traduits par un interprète officiel (moyennant finances !), que ce soit mon acte de naissance (photocopie certifiée conforme, avec une écriture joliment calligraphiée par l’officier d’Etat Civil de l’époque – parfaitement lisible, mais pas assez « officiel » - entendez « écrit sur ordinateur »…) , mon livret de famille, ou mes diplômes (sur lesquels c’est écrit : République Française, Docteur en Médecine, etc – rien que des termes forcément incompréhensibles pour les mauvaises volontés…). Ma traduction personnelle – ou celle de ma mère, germanophone de naissance – ne leur va pas du tout…
Etc, etc…
Le problème est que si je n’ai pas tel papier, je ne peux pas continuer la suite… J’ai donc dû tricher sur ma date d’installation en Allemagne : car si j’avais dit 31 août – ce qui est la date officielle – c’était trop tôt pour m’enregistrer. Et sans enregistrement, pas de demande de casier judiciaire, pas de permis de travail. La visite médicale est aussi un facteur limitant… Si je ne passe pas la visite médicale (pour laquelle je dois avoir une attestation de travail…), pas d’attestation de bonne santé, et pas de permis de travail non plus…
Sans compter l’administration qui exige de voir les originaux, qui veut des copies, mais qui n’a aucune photocopieuse dans le bâtiment de 5 étages… (premier Copy-shop à 2 stations de métro...)
Heureusement que j’ai une attestation du chef de mon futur service disant que je vais réellement travailler chez lui – en tous cas, il en a envie, et m’a donc écrit toutes les attestations possibles…… (+ des photocopies gratuites)
Et heureusement que j’ai de bonnes jambes, et une carte d’abonnement au métro pour la semaine ! Et que je me débrouille sans trop de problème en allemand...

Bref, un grand bonheur que de voir ces administrations engluées dans des carcans… et surtout beaucoup de temps perdu (quasi non-stop de 9h à 19h hier, et 8h - 13 h aujourd'hui) . Il n’y a pas qu’en France…
J’ai soudain une pensée émue pour tous ces étrangers qui errent de bureaux en bureaux dans nos Préfectures pour obtenir le moindre papier…
Voilà…
Jusqu’à présent : PAS UNE photo depuis que je suis ici. L’ambiance n’y est pas…

Encore une fois : Vive l’Europe que je croyais (jusqu’à ces jours-ci) unifiée, avec des tracas administratifs allégés…
  • Message par insoL, vendredi 27 juillet 2007 à 16h24
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Mais, chère Diva, l'Europe, n'est pas là pour simplifier, mais pour compliquer !
Car cela fait des règlements et des administrations en plus et non en moins !
(mais vive l'EURO, quand même, non ?)
Avec toute ma compassion !

  
insoL
Mais, chère Diva, l'Europe, n'est pas là pour simplifier, mais pour compliquer !

En effet...
Je vais vous relater deux histoires vraies, récemment vécues dans mon service hospitalier français.

1) Un homme originaire de Hongrie (dans l'UE depuis mai 2004), en France depuis 9 mois, avec permis de séjour temporaire, etc, a été hospitalisé en urgence pour un problème grave. Nécessitant des soins prolongés sur plusieurs mois, et un logement plus salubre que celui qu'il avait trouvé.
Pour obtenir un logement, il devait avoir un permis de séjour prolongé, et pour l'avoir, il devait avoir un contrat de travail. Mais à cause de sa maladie, il ne pouvait pas travailler. J'ai appelé la Préfecture pour voir comment arranger les choses, en faisant un certificat médical attestant son incapacité temporaire, mais prolongée, à travailler, et la nécessité médicale d'un logement salubre, certaine qu'avec l'Europe, etc...
Ils m'ont répondu ceci : pour les ressortissants des derniers pays entrés dans l'UE, il y a une période moratoire de x années pendant lesquelles on ne leur attribue pas de permis de séjour prolongé tant qu'ils n'ont pas de contrat de travail. Et que l'impossibilité médicale de travailler (certificat à l'appui) ne servirait à rien. En revanche, s'il était originaire d'un pays hors Union Européenne, (Afrique du Nord, Asie, Turquie...), ça ne poserait aucun problème, et il obtiendrait, pour raison de santé, un permis de séjour et un logement sans difficulté.
Je vous jure que c'est vrai.
Vive l'Europe !

2) Une femme turque était venue en France (avec Visa de touriste en règle) pour s'occuper de ses petits enfants en bas âge pendant que sa belle-fille, de nationalité française, était hospitalisée pour un cancer du sein en phase terminale, et que son fils, français, travaillait payé au SMIC.
Cette femme a aussi été hospitalisée en urgence pour insuffisance cardiaque sévère, justifiant des soins particuliers. Aucune prise en charge sociale en France, même si en Turquie elle avait une prise en charge (pas d'entente franco-turque, visiblement). Pensant que le statut de touriste hospitalisée en urgence suffirait, j'appelle ma direction qui me signifie que bien qu'étant en règle sur le territoire français, le certificat d'urgences de soins que je pouvais écrire ne servirait à rien, et qu'elle devrait payer 100 % de son hospitalisation, à # 1500 € la journée, soit ce que gagne son fils par mois... Si elle ne peut pas payer, son fils sera redevable, car solvable. Mais ne vous en faites pas, on pourra s'arranger et étaler les paiements...
Elle est restée 3 jours =3 mois de salaire pour son fils déjà dans le malheur avec sa femme en fin de vie.
La conclusion aurait été tout autre si elle avait été en situation irrégulière en France : les soins auraient été pris en charge par la communauté.
J'avoue que parfois, les bras m'en tombent

Finalement, avec mes tracasseries de papiers et d'allers-et-retours, je m'en sors pas mal. Je vous passe toutes les démarches déjà entreprises en France (Sécu, assurance Responsabilité Civile, assurance voiture, impots, etc que je dois changer pour un an - pour faire machine arrière dans un an...)

piratilux.net
Bon courage :rollr: Mais ne t'inquiète pas : chez "Leica Berlin", seule la couleur de tes € compte :wink:

vert de préférence ... :arrow2: :arrow2:
    L'administration

Ubu ou Alice aux pays des Merveilles et la logique de Lewis Carrol dans ses personnages.


Danyves

Salut Marielle,

concernant cette dame turque il y a les assurances qui sont faites pour ça. Il en serait de même pour toi si tu partais dans un pays sans etre couverte. Il est vraiment dommage que ce genre d'oubli atteigne toujours ceux dans le besoin. Toujours etre assuré avant de partir à l'étranger.

Concernant ton integration en Allemagne cela ne me choque pas du tout et même me rassure. Les allemands verifient eux même que tu respectes leurs normes. C'est la même chose dans une entreprise lorsque tu changes de département. C'est le département qui t'accueille qui évalue et pas le contraire. S'il n'y avait pas l'Europe tu n'aurais peut être pas eu le droit d'exercer en Allemagne.

  
Parfois, c'est trop facile de faire rire avec l'administration…
Je vis avec une professeur de lycée.
Depuis deux ans, elle enseigne dans deux lycées à la fois (il semble qu'il est tellement difficile de créer des postes complets).
En cette journée de rentrée, elle a pris connaissance de ses emplois du temps : une véritable prouesse, en toute concertation, les deux établissements ont fait des emplois du temps qui, au lieu de se compléter, se superposent parfaitement : pas une seule heure de la semaine qui y échappe !

Bonjour,

Cela doit être la rançon de la décentralisation. Pour te rassurer en 1973 mon épouse parfaitement trilingue Anglais Espagnol Italien avait postulé comme enseignante ; Elle avait obtenu 3 lycée Orleans Montargis Gien soit un trialgle isocèle de 100 Km 100km 50 km à 1/3 temps chacun organisé par le Rectorat.

Elle a fini par abandonner l'enseignement & continué dans le privé.

Je crains que l'Administration, quel que soit le Gouvernement, reste d'une Organisation / Gestion défiant les lois de la logique même 35 ans après cette histoire.

BouBou
Retour vers Leica.

  
Je raconte ça parce que c'est drôle.
Mais de là y a voir un signe quelconque contre la décentralisation ou autre… il faut raison garder.
C'est simplement une superbe erreur de communication entre deux bureaux :
— donc, voici les demi-journées libres et les demi-journées occupées de Mme XX
— OK, c'est noté

(mais noté exactement à l'envers ! : les deux emplois du temps sont rigoureusement identiques).
Ça peut arriver à tout le monde.
  • Message par insoL, mardi 4 septembre 2007 à 8h20
    citer

J'allais le dire :D:
En plus, le second a fait l'effort de s'adapter — parfaitement — à l'horaire du premier.
Comme quoi, la bonne volonté ne suffit pas et pour corriger ça, … :roll:
  • Message par nel, mardi 4 septembre 2007 à 8h23
    citer

J'ai enseigné 3 ans la photographie dans l'éducation nationale, j'ai démissionné fin juin, au mois de septembre suivant j'ai continué de percevoir le salaire durant 4 mois encore, alors que la personne qui m'a remplacée n'a commencé à être payée que fin octobre. Sagement j'avais mis l'argent de côté je savais bien qu'il allait falloir le rendre, j'ai dû en mars / avril, au moment de la déclaration d'impôt et parce que je voulais éclaircir la situation, appeler moi même l'académie pour savoir comment je devais les rembourser. Personne n'avait bougé.

  
Il ne faut peut-être pas jeter tous les bébés avec l'eau du bain, non ?
J'ai dirigé un labo CNRS pendant une dizaine d'année et même si c'était parfois cocasse la recherche avançait bien.
Les seuls gros écueils que j'ai rencontrés sont ceux qui font par ailleurs l'union sacrée. Tout d'abord le statut de la fonction publique, paradigme syndical, où un employé recruté à 25 ans sait à peu près exactement quel sera son salaire à sa retraite, quelle que soit la quantité et qualité de travail qu'il aura fourni. Mais ça, c'est socialement intouchable.
L'autre est le code des marchés publics, allégorie de la Vertu Républicaine, censé empêcher l'utilisation frauduleuse des fonds publics (rires) mais qui en empêche surtout l'utilisation honnête. Intouchable aussi, politiquement.

Quant à l'éducation nationale, comment manager un tel monstre de manière centralisée ? (remarquez que ça fonctionne mieux pour les instits, gérés localement)
Surtout sans souplesse dans la gestion du personnel (v. plus haut...). Mais cette cathédrale est tout aussi intouchable : j'ai été prof à l'université pendant 13 ans, les facs crevaient de ce centralisme et j'entends des condamnations véhémentes de leur timide autonomie...

En France, nous avons donc ce que nous méritons quand certains descendent dans la rue pour défendre la gestion soviétique de la fonction publique en l'identifiant abusivement au service public : on peut imaginer des services publics gérés et managés intelligemment, mais il est souvent plus facile de privatiser que de tenter des réformes...

A part ça, de mon expérience d'accueil de nombreux scientifiques étrangers, j'ai appris qu'effectivement l'Allemagne semble détenir une place de choix dans le hit-parade des bureaucraties labyrinthiques...
Quelqu'un qui fait des images ne peut pas être rassurant
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