Je crois que c’est une constante de l’UNEF : servir de tremplin pour ses dirigeants, vers une autre vie politique, une carrière, être un marchepied vers les ors de la République.
Je ne suis pas convaincu qu’ils cherchent à être un « vrai » syndicat, au sens où l’UNEF serait une force d’opposition et de négociation. S’y retrouvent des étudiants qui y font leurs premières armes politiques, pas toujours de la manière la plus transparente, ni la plus démocratique.
Je me souviens, lors de ma vie d’étudiant, des tentatives (souvent réussies), de faire voter n’importe quoi, en toute opacité, et avec pas mal d’intimidation.
Je me souviens aussi d’amis qui en faisaient un tremplin ; certains sont maintenant au PS, dans les sphères dirigeantes.
Alors,
écœuré de ne plus être "jeune" ? Non, pas du tout, pour ma part, très heureux d’être ce que je suis, maintenant, ici.
J’ai la faiblesse de croire que dans mon métier, et dans d’autres activités périphériques, ce que je fais est utile. Je pense pouvoir être utile autrement qu’en pensant à la réforme de la société, et, tout en étant plutôt de ceux qui sont politisés, je laisse aux professionnels le soin d’agir et diriger l’action.
Certains d’entre eux sont d’une efficacité confondante (tu cites notre président), et je les déteste cordialement. Mais il faut bien aussi avoir une couleur politique, et celle-ci (celle de notre président) n’est vraiment pas la mienne (*).
(*) : c'est magique : qu'il cherche à parler de l'âme de la France, qu'il porte des joggings ou des costumes noirs, qu'il cherche à avoir l'air sympa ou qu'il gueule comme un soudard, qu'il fasse de la politique ou fréquente les arts (genre Hallyday ou Clavier...), je ne peux pas le supporter, c'est ainsi, c'est culturel, et peut-être génétique ?
Je ne pense pas mon
âme corrompue, au contraire.
Je me maintiens loin de ce type d’action, car aucun mouvement ne me satisfait.
Surtout pas les mouvements étudiants, pour les raisons évoquées ci-dessus, mais aussi car j’ai le sentiment que la position d’étudiant en grève est incohérente : la grève est un moyen de peser sur une direction (au sens large ou restreint) pour obtenir par la force ce qu’on n’a pas réussi à obtenir par la discussion, dans un rapport de force, comme le contrat de travail, qui est, pour beaucoup de salariés, une violence.
Les étudiants n’ont pas signé de contrat autre que de recevoir une formation gratuite ou peu onéreuse, dispensée par de grands professeurs qui, de manière assez magique, même lorsqu’ils sont des pontes, viennent chaque jour offrir leur savoir dans des amphithéâtres d’accès libre. Je trouve cela admirable.
Je me souviens ainsi avoir écouté Maurice Aghulon, Pascal Ory, et bien d’autres, certes dans des locaux pourris, certes en très grand nombre, mais quelle merveille, tout de même !
Autant je comprends la révolte d’une jeunesse qui demande : «
quelle place pour nous demain », «
quelle société voulons nous bâtir », etc., autant je ne comprends pas ce bras de fer avec des universités mises en péril, alors qu’elles n’ont d’autre objectif que d’offrir ce savoir ouvert.
J’ai vraiment l’impression que ces agissements sont le fait de minorités manipulées, récupérées, par des mouvements politiques qui ne prennent même pas la peine de leur expliquer quels sont leurs objectifs réels.
Je ne voulais pas dire qu’
une fois atteint un certain niveau de confort, on ne veut plus le perdre et prendre des risques, mais qu’il me semblait que les revendications entendues ces dernières années de la part des étudiants étaient soit coupées de toute réalité, soit surtout pilotées par des minorités activistes au service de partis, et non issues d’une volonté profonde d’une génération de vivre autrement, de penser la politique autrement, ce qui était, quoiqu’on en dise et pense, et quoi que soient devenus leurs dirigeants (on les dit embourgeoisés, traîtres, et toutes sortes d’autres choses), le fait des soixante-huitards, qui ont durablement changé la manière de voir le monde et la vie.
Mais comme le dit Garotinho, 68, ce n’était pas que quelques voitures brûlées à Paris, ou un vieux chef français vacillant, c’étaient des mouvements mondiaux, de révolte contre l’URSS, contre la politique US, contre le paternalisme politique, pour le plaisir, la liberté, la culture, l’espoir.
Jouissons sans entrave…
Ceci étant dit : belle, ta dernière photo !