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Numériser un film couleur avec NikonScan

Message Publié : dimanche 6 juin 2010 à 17h58
On m'a parfois demandé d'expliquer la démarche de numérisation d'un film.
Je ne possède pas dans ce domaine le savoir professionnel nécessaire pour donner des explications exhaustives.
Ce n'est donc ni un tutoriel, ni un cours, mais le compte-rendu d'une numérisation, avec NikonScan, un CoolScan V, un film négatif couleur, et un Macintosh.

Tout d'abord, il faut avoir réglé correctement les préférences de NikonScan.

Voici quelques réglages de base que j'utilise, sachant que je souhaite que le scanner ne fasse pas d'opérations automatiques, en dehors de la mise au point, et que les fichiers créés aient un profil qui me permette de les afficher ensuite de façon fiable dans Photoshop, logiciel avec lequel je vais faire les finitions : redimensionnement, accentuation éventuelle lors d'un ré-échantillonnage, etc.
Il va de soi que la numérisation sera faite en 16 bits par couche.









Après la prévisualisation, je sélectionne la zone qui doit être prise en compte pour l'affichage des données de l'image. Cette zone correspond à la totalité de l'image, et seulement à celle-ci, car sinon, les données présentées prendront compte des parties de la zone hors photo.
Si je souhaite saisir aussi les bords de la photo, j'élargis la zone en fin de travail, juste avant de faire la numérisation.



Voici les histogrammes de la prévisualisation :



On voit que les hautes lumières sont un peu coupées. Le passage de la pipette sur les zones claires de la photo me le confirme.
En affichant successivement les histogrammes du rouge, puis du vert, et enfin du bleu, je constate que le vert et le bleu sont coupés, de manière plus tranchée pour le bleu.
On passe d'une couche de couleur à l'autre avec le menu en haut à gauche de la palette, ou avec l'équivalent clavier cmde-1 (rouge), cmde-2 (vert), cmde-3 (bleu), et revient à l'affichage de la synthèse des trois couleurs avec cmde-maj-n



Au moyen de la commande accessible par la palette "gain analogique", je déplace légèrement vers la gauche les niveaux vert et rouge.
En cliquant sur redessiner, l'aperçu est recréé corrigé. Si la modification demandée est importante, une nouvelle prévisualisation est lancée ; si elle est peu importante, la prévisualisation précédente est suffisante pour que le logiciel affiche les nouvelles données qui seront utilisées pour la numérisation.



Penser que la palette des courbes et niveaux de NikonScan peut être affichée en diverses tailles à volonté. Petite, elle permet d'être discrète sur le moniteur, grande, elle permet de travailler avec finesse.





Noter que ces copies d'écran montrent cette palette des niveaux avec un travail déjà bien avancé.
Comment s'y prend-on ?
En utilisant ses yeux (est-on content des contrastes et dominantes que l'on observe sur son écran préalablement calé ?) et l'outil pipette.
En promenant celle-ci sur l'image de prévisualisation, elle donne les informations sur deux palettes simultanément : sur la palette des courbes et niveaux, en repérant par un petit point sur la courbe où est la zone mesurée en valeur, et ceci dans les trois couleurs également, et sur la palette d'informations. Ici on a les valeurs R : 148, V : 119 et B : 71.
Voici ces deux palettes, ci-dessous :



On peut commencer le travail couleur après couleur : calage à droite et à gauche (hautes et basses lumières), et valeurs intermédiaires :







On voit qu'ici j'ai décalé le rouge de deux points vers la gauche à droite, maintenu la valeur de rouge dans les zones sombres (un point pour fixer), et augmenté globalement le rouge ailleurs (un deuxième point pour "tirer" vers le haut). J'ai globalement augmenté le vert, après avoir réduit d'un point dans les hautes lumières (valeur 252). J'ai baissé le bleu dans les zones sombres, et l'ai conservé dans les zones moyennes et claires. Noter que lorsqu'on fait ces manipulations, la palette informations répercute en temps réel les modifications, affichant les valeurs de la prévisualisation, et les valeurs corrigées.


(exemple tiré d'une autre numérisation, au cours de laquelle on a recherché un gris neutre)

Noter également que le dernier point inséré sur la courbe est déplaçable au moyen de la souris, des flèches du clavier (permet de déplacer point par point, très précis), et que les corrections sont affichées en bas de la palette de courbes (entrée et sortie).

Deux autres courbes sont utiles pour bien régler son image :
Dans la palette Editeur LCT, la courbe de Chroma permet de contrôler la saturation des couleurs. En tirant vers le haut, on augmente la saturation ; vers le bas, on désature. Suivant que l'on insère un point de contrôle à droite ou à gauche, on va jouer sur la saturation des hautes ou basses lumières. Ou peut aussi couper à droite, à gauche, etc. : toutes les manipulations classiques d'une courbe. À manipuler avec précaution et délicatesse, en observant bien le résultat, qui est également répercuté sur les courbes de la palette Courbes et niveaux.



La courbe de Clarté permet de jouer sur les densités, et contrastes, exactement comment la courbe générale RVB de la palette courbes principale. Son intérêt peut sembler limité. Mais souvent, elle permet d'appliquer simultanément deux types de corrections, en étant conjointement utilisée avec la courbe principale de la palette courbes. Ici, j'ai un peu foncé l'image, pendant que dans la palette courbes, j'ai maintenu les basses lumières, éclairé les zones moyennes et hautes, et augmenté les contrastes de cette photo prise en fin de journée, en sous bois, avec un jour baissant.





Prévisualisation à cette étape intermédiaire, le travail étant bientôt achevé (j'appelle achevé = déclaré globalement satisfaisant par son auteur).



Photo finale :



ADDITIF :

A quoi servent les petits boutons des palettes ; exemple avec la palette courbes



1. Menu permettant d'enregistrer une courbe, de la recharger en mémoire pour l'appliquer ultérieurement.
2. niveaux automatiques : considérer que ça ne sert à rien…
3. contrastes automatiques : considérer que ça ne sert à rien.
4. après sélection, fixera comme référence blanche le pixel cliqué sur la prévisualisation. Peut permettre de visualiser l'effet et de renseigner ainsi sur des dominantes de l'image ; revenir ensuite à zéro…
5. après sélection, fixera comme référence grise moyenne le pixel cliqué sur la prévisualisation. Peut permettre de visualiser l'effet et de renseigner ainsi sur des dominantes de l'image ; revenir ensuite à zéro…
6. après sélection, fixera comme référence noire le pixel cliqué sur la prévisualisation. Peut permettre de visualiser l'effet et de renseigner ainsi sur des dominantes de l'image ; revenir ensuite à zéro…
note : en règle générale, je considère ces boutons comme inutiles. On ne peut pas annuler leur action sans annuler tout le travail antérieur, à moins d'avoir enregistré l'état de la courbe avant d'utiliser ces boutons. Dans certains cas, ils permettent de dégrossir, et on affine ensuite.
7. remet la courbe affichée à zéro sans affecter les autres (RVB, ou vert, etc. Ici : bleu).
8. remet toutes les courbes à zéro.


Notes :

a - il est bien entendu que ce n'est pas un guide exhaustif, ni parfait. C'est une tentative d'explication de ce que je fais, profitant de l'occasion pour présenter quelques réglages de base de NikonScan.
b - j'ai chaoupiné encore un peu entre la dernière copie d'écran et le résultat final ; je n'ai pas continué à faire des copies d'écran.

Message Publié : dimanche 6 juin 2010 à 19h13
par HB
J'ai survolé, j'y reviendrai plus tard, quel beau travail Laurent, merci :bise:

Message Publié : dimanche 6 juin 2010 à 19h36
Ditactissime :)

Message Publié : dimanche 6 juin 2010 à 21h31
du beau travail qui nécessitera plusieurs lectures :lol:

Message Publié : mercredi 25 août 2010 à 17h04
C'est impressionnant. J'en reste sans voix ! Merci de partager tes connaissances.

Message Publié : mercredi 25 août 2010 à 19h20
Je suis content que tu apprécies.
Ce n'est pas très facile d'expliquer, et cela m'a pris du temps.
J'ai tenté aussi d'expliquer l'ouverture d'un fichier raw.

Message Publié : vendredi 27 août 2010 à 8h53
Wow !

Merci Laurent de partager ce savoir faire et d'avoir pris le temps de le faire (ça a dû te prendre littéralement des heures...)

Je me rends compte qu'avec sensiblement les mêmes outils que toi, je m'en sers comme un cochon, loin d'imaginer que l'on peut pousser aussi loin les réglages...

Je vais tâcher de mettre en pratique ta technique.

Affaire à suivre !


MERCI ENCORE

Message Publié : lundi 30 août 2010 à 14h05
Je vois que tu choisis l'espace colorimétrique "Adobe RVB (1998)" quelle différence y a-t-il avec l'espace "sRVB" ?

Message Publié : lundi 30 août 2010 à 14h49
L'espace de couleur sRVB a été conçu par HP et Microsoft pour l'affichage sur les PC ; c'est devenu le standard pour l'affichage des images dans les navigateurs web.
Il s'agit d'un espace de couleur réduit et appauvri, qui s'est imposé comme une norme d'affichage, mais qui ne comporte pas assez de nuances pour faire un travail photographique fin. Certaines couleurs, comme les jaunes saturés et les cyans, sont en dehors de l'espace.

L'espace Adobe RVB 98 est plus large, adapté à la fois à l'affichage à l'écran pour une session de travail, et au prépresse. Il est utilisé par la majorité des machines à tirer numériques haut de gamme, et convenable pour faire un export, depuis Photoshop par exemple, vers un profil CMJN de type Euroscale Coated, pour une impression en quadrichromie.

Il existe encore d'autres espaces colorimétriques, plus larges, comme l'ECI-RGB, plus vaste vers les rouges et les jaunes.

Matériellement, que cela signifie-t-il pour nous ?

Lorsqu'on travaille dans un espace de couleur restreint, la moindre richesse des couleurs enregistrées ne permet pas un travail aussi fin d'une part, et les manipulations sur les couleurs (courbes, niveaux), tendent à générer des nuances intermédiaires qui ne sont pas présentes dans le fichier tel qu'il a été enregistré : résultat, on génère une destruction des données, des dégradés "en escalier", des aplats parasites, du bruit.
Il est nécessaire d'avoir la plus grande quantité d'informations enregistrées pour pouvoir travailler avec finesse : non seulement avec au moins un profil Adobe RVB 98, mais aussi avec un codage sur 16 bits par couche, pour les mêmes raisons.

Cet espace garantit une reproduction fidèle des couleurs vues à l'écran pour un tirage numérique, pour peu, bien entendu, que l'ensemble soit étalonné : moniteur, et matériel de tirage.
Il garantit un bon transfert en CMJN pour une impression en quadri.
Il permet aussi, au moyen d'un bon logiciel de traitement d'image, un transfert correct, sans trop de mauvaises surprises, vers le sRVB pour des images destinées au Web, ou pour des échanges d'images jpeg.
Le moyen le plus pratique pour ce dernier besoin est d'utiliser, après un travail en Adobe RVB 98, la fonction "enregistrer pour le web" de Photoshop, qui effectue automatiquement la conversion en sRVB.

Note :
si le moniteur utilisé ne permet pas de voir tout l'espace couleur du RVB98, il peut être souhaitable, pour préparer correctement une photo pour le web, de travailler directement en sRVB.
Pour un tirage numérique sérieux, ou une impression de bonne qualité, il faut avoir un moniteur qui permet de voir les nuances travaillées, et qui affiche au minimum le RVB98, ou plus large (comme le fogra 39 par exemple).

Message Publié : lundi 30 août 2010 à 14h53
Parfaitement clair ! Merci Laurent.

Message Publié : lundi 30 août 2010 à 15h00
Avec plaisir.
Voici trois compléments :

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L'affichage :

A noter lorsqu'on travaille dans Photoshop (je ne sais pas ce qu'il en est dans d'autres logiciels d'images) :
il faut indiquer, après avoir ouvert un fichier de photo, au moyen du menu Affichage => Format d'épreuve, dans quel système on travaille : Mac, ou PC sous Windows, afin que l'affichage de travail soit fidèle (espace, et gamma).



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Réglage des préférences de couleurs dans Photoshop :

Il est bien entendu qu'on a réglé ses matériels de la même manière : on leur a indiqué le gamma du moniteur, on a calibré ce dernier, on est en espace de couleur Adobe RVB98 sur le scanner et dans Photoshop, ou autre espace de couleur large (pas sRGB qui est un profil appauvri réservé à la création de fichiers web) ; enfin, bien sûr, on fait tout en 16 bits.
Dans Photoshop : Edition => Couleurs…



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Une autre session de travail en pas-à-pas :

Dans ce cas-ci, pour me faciliter le travail en vue du calage d'une série (un petit reportage), j'ai disposé un outil qui m'aide à faire le premier calage : une charte que j'ai photographiée sur place.

Elle me permet de caler les zones neutres, et de vérifier ensuite à l'œil les valeurs des couleurs : j'ai la photo à l'écran, et l'objet sous les yeux.
J'ai choisi d'utiliser cet exemple, car je fais d'une pierre deux coups, et c'est ainsi peut-être plus didactique.
Dans ce cas-ci, on sait que le noir est noir et le blanc est blanc.
Laisser éventuellement plus de bleu, ou plus de vert, sera choix de rendu final, mais au départ, on cherche la neutralité, pour pouvoir bien en juger.
Noter que rarement, les noirs sont noirs, et les blancs blancs : non seulement il faut prendre en compte la température de couleur, mais aussi, des reflets. Ainsi, ci-dessous, ce noir n'est pas noir, il est gris très foncé (valeur 31).

Pour le rendu final, j'augmenterai certainement les contrastes, et baisserai ces valeurs, mais pas tout de suite, car sinon, je vais "couper" des valeurs plus sombres dans la photo.
A noter que le travail du rendu final sera différent suivant que je le destine à un tirage, ou à une vue à l'écran.

Sur le noir de la charte, j'ai les valeurs suivantes : R = 41, V = 38, B = 39
Après réglage, j'ai R = 31, V = 31, B = 31



Sur le blanc j'ai R = 247, V = 253, B = 254
Après réglage, j'ai R = 249, V = 249, B = 249



Je vérifie sur une zone théoriquement neutre, sur laquelle j'avais R = 151, V = 163, B = 155
Après réglage, j'ai R = 150, V = 150, B = 150
À noter sur le noir en dessous de la zone grise analysée par le curseur, j'ai les valeurs R = 8, V = 8, B = 8 :
ceci montre bien qu'il ne fallait pas baisser les valeurs '31' de la charte (étape 1 ci-dessus). Éventuellement, en toute fin, je baisserai cette zone à '1' ou même ponctuellement '0'.



En théorie, je ne suis pas loin de la réalité.
Le reste est maintenant affaire d'interprétation.

Dans les zones les plus proches de la lumière électrique, il y aura des dominantes jaunes ;
dans les zones proches de l'extérieur, il y aura des dominantes bleues.

C'est alors le travail du photographe/tireur de choisir cet équilibre, sur une base saine.

On remarque qu'il a fallu pour ce premier calage, réduire une dominante rouge dans les zones sombres, une dominante bleue dans les zones claires, une dominante verte dans les zones médianes et claires.

L'outil des courbes de Photoshop fonctionne exactement de la même manière.

Dans ce cas-ci, ce qui est pour moi fort pratique, c'est que NikonScan me permet d'enregistrer ce réglage que je vais utiliser pour les prévisualisations de l'ensemble de la série réalisée sur place. Cela servira de base pour numériser les autres photos.

Message Publié : lundi 30 août 2010 à 16h06
par nel
J'ajouterai pour ceux en particulier qui sortent vers le CMJN (prépresse) qu'il vaut mieux aujourd'hui utiliser dans les préférences de photoshop le "fogra 39" ou "ISO coated V2" et parfois "ISO coated V2 300%" de l'ECI.
Pour les niveaux de gris utiliser "gray gamma 2.2" y compris pour les utilisateurs de Mac qui doivent régler maintenant (sur recommandation d'Apple) le gamma écran à 2.2.

Les profils précités se trouvent sur le site de l'ECI

Voir Offset printing et working color space